E.S. 1025 ou les mémoires d'un Anti-Apôtre - MARIE CARRÉ - 9

Publié le par monSeigneur et monDieu

CHAPITRE XIV

 

OÙ IL EST DÉMONTRÉ COMMENT UNE ÉGLISE UNIVERSELLE

DEVRAIT CHANTER LA GLOIRE DE LHOMME

 

    Avant de procéder à l’étude approfondie du sacrement d’Eucharistie, j’envoyai mon travail à l’étudiant ainsi qu’aux cheveux noirs.

 

    L’étudiant fut tellement enthousiasmé qu’il me contacta un jour à l’Université pour me remettre une série d’articles. En rougissant, il souhaitait mon appui pour être publié dans une bonne revue. En principe, nous n’aurions pas dû nous parler en public, mais je pensais qu’en raison de la guerre, je pouvais prendre des initiatives. Discuter ouvertement avec l’étudiant, échanger des documents ne présentait aucun danger. J’étais d’autant plus à mon aise que, dès que je fus autorisé à suivre deux cours à l’Université, j’achetai une moto, ce qui m’évitait l’offre d’être raccompagné par l’un ou par l’autre.

 

   Les articles de l’étudiant étaient tout simplement remarquables. J’aurais même pu en être jaloux, car moi, je ne suis pas un écrivain. Mais je vis tout de suite quelle précieuse influence auraient ces articles si excellemment tournés. Nous allions vers une collaboration idéale ; moi, je fournissais les idées, présentées froidement dans toute leur rigueur, et l’étudiant choisissait les plus remarquables ou du moins celles qui lui inspiraient des articles astucieux. Sentir mes idées germer pour épanouir des fleurs littéraires excitait mon génie car, dans ce tandem, le génie c’était moi, l’étudiant n’était que le talent.

 

   Je trouvai facilement une revue qui, moyennant finances, accepta de publier régulièrement les articles inspirés par moi. Je les fis passer dans tous les pays non encore en guerre, afin qu’ils fussent traduits et répandus. Mais je dois avouer qu’ils n’eurent de véritable succès qu’après la guerre.

 

    Ayant bien plus confiance dans l’étudiant que dans le professeur imposé par mes chefs, je pris une deuxième boîte postale dont je lui donnai la clef. Comme en plus, il était convenablement payé, il me prit pour un dieu et se serait fait tuer pour moi.

 

Comme les cheveux noirs ne répondaient pas, je lui envoyai régulièrement les articles de l’étudiant en précisant, dans une petite lettre affectueuse, qu’ils étaient le reflet de ma pensée.

 

    Les cheveux noirs furent sensibles au talent de l’étudiant et m’écrivirent pour me dire que ces articles étaient beaucoup plus sympathiques que mon travail si brutal. Je ris sous cape, les articles ne disaient absolument rien d’autre que ce que j’avais si brutalement (!) énoncé. Cela me confirma dans l’idée que le talent littéraire permet de faire avaler des projets tout neufs comme s’ils étaient enrobés de chocolat.

 

    Pendant toutes ces longues semaines, les cheveux noirs ne m’invitèrent pas à revenir dans l’atelier. Je rageais, quand un jour je croisai celle que je considérais comme étant mienne, dans les couloirs de l’Université. Elle avait décidé de suivre des cours d’art ancien. Elle s’arrêta pour me dire qu’elle préparait une réponse à mon projet de nouveau catéchisme, en espérant pouvoir en discuter tout gentiment avec moi. Discuter, discuter Je n’avais pas l’habitude de rencontrer le moindre obstacle sur les chemins où je lançais mes idées... Mais je lui répondis que le plaisir de la revoir me tenait trop fortement pour que je n’accepte pas son désir de discussion. Cependant, je me promis de lui dire qu’une femme vraiment amoureuse adopte, sans même s’en rendre compte, toutes les opinions de l’homme que son cœur a choisi.

 

    Ce jour-là, je lui dis seulement que je travaillais au sacrement d’Eucharistie, afin de compléter le nouveau Catéchisme que je lui avais envoyé. Elle eut un soupir, puis des larmes dans les yeux, enfin se sauva sans rien me répondre.

 

   Je voulus inscrire, en tête de ce travail si passionnant, la véritable définition de l’Eucharistie, je veux dire celle qui est tenue pour seule véritable par les catholiques (bien entendu, les protestants en ont plusieurs autres). A la question qu’est-ce que l’Eucharistie ? tout enfant catholique doit donc répondre : « L’Eucharistie est un sacrement qui contient réellement et substantiellement le Corps, le Sang, l’Âme et la Divinité de Jésus-Christ, sous les apparences du pain et du vin ». Rien que cela !!!

Alors, là, il s’agit de travailler sérieusement. Non pas que cette croyance ne puisse être combattue, mais il faut être prudent et ne pas attaquer de front.

 

Cette soi-disant « présence réelle du Christ sous les apparences du pain et du vin » doit être attaquée par des moyens détournés. Si on l’attaque de face, ils se révolteront. Rien ne serait plus dangereux, car il est bien connu que la persécution exalte la foi. Il faut donc passer sous silence l’expression « présence réelle » et mettre en lumière tout ce qui peut détruire ou affadir cette conviction.

 

Il est donc de première nécessité de réformer complètement les paroles de la Messe et même il sera bon de supprimer l’usage du mot lui-même et de le remplacer soit par celui de « Cène » ou celui d’« Eucharistie » (par exemple).

 

La rénovation de la messe doit minimiser l’importance de ce qu’ils appellent la consécration et doit donner à la communion une apparence beaucoup plus banale.

 

Il y a là un travail de longue haleine qui ne doit négliger aucun détail. Ainsi, pour commencer, il faut remarquer que le prêtre sacrificateur tourne le dos au public et semble parler directement à un Dieu invisible, un Dieu cependant représenté par le grand crucifix qu’il a en face de lui.

 

Ce prêtre est donc à la fois le choisi de Dieu et le représentant de la foule qui le regarde.

Il donne une impression de puissance, mais aussi de séparation. Il sera bon de faire sentir que les paroissiens se sentent un peu perdus, un peu isolés, un peu abandonnés et qu’ils seraient tout heureux si le prêtre voulait bien se rapprocher d’eux. Quand cette idée aura fait son chemin, nous offrirons la possibilité d’abandonner l’autel surélevé et de le remplacer par une petite table absolument nue où le prêtre se tiendra face au peuple. En plus, la partie du culte qui concerne proprement l’Eucharistie et qui nécessite donc cette table, sera écourtée au maximum et la partie enseignement de la Parole de Dieu sensiblement allongée. Il est bien connu que les catholiques sont d’une ignorance révoltante en ce qui concerne la Bible ; aussi cette modification de la conduite de la Messe leur paraîtra-t-elle légitime. Je ne dis pas qu’ils seront heureux d’entendre de longs extraits de la Bible, car bien souvent ils n’y comprendront rien, mais il n’est pas nécessaire qu’ils comprennent, du moins tant que des prêtres vraiment socialistes n’auront pas été formés.

 

Chaque texte composant l’Ordinaire de la Messe sera soigneusement comparé avec les textes en usage chez les Anglicans et les Luthériens, afin de promouvoir soit un texte unique, soit de préférence des variantes susceptibles d’être reçues par ces trois religions.

 

Qui ne voit l’immense avantage qu’il y a dans ce procédé qui donnera aux mêmes mots des significations très opposées ? L’unité des esprits se fera ainsi dans l’ambiguïté, car elle ne peut de toute façon se faire autrement. Il n’y a pas d’autre alternative : conversion ou ambiguïté. Je choisis ce biais qui me permet d’atteindre la « présence réelle ». Quand les catholiques verront des protestants venir communier à leurs messes, sans s’être convertis, ils n’auront plus la moindre confiance dans leur antique « présence réelle ». On leur expliquera que cette Présence n’existe qu’autant qu’elle est crue. Ainsi ils se sentiront les créateurs de toute leur religion et les plus intelligents sauront en tirer les conséquences qui s’imposent.

 

Pour atténuer encore la notion de « présence réelle » du Christ, il faudra renoncer à tout décorum. Plus de riches vêtements brodés, plus de musique dite sacrée, notamment plus de chant grégorien, mais une musique à inventer dans le style du jazz ; plus de signes de croix, ni de génuflexions, des attitudes dignes et sévères. En plus, il faudra que les fidèles se déshabituent de se mettre à genoux et cela sera même absolument défendu pour la Communion. Rapidement, il faudra donner l’hostie dans la main, afin que toute notion de sacré soit effacée. Il ne sera pas mauvais de permettre à certains (à désigner d’avance) de communier sous les deux espèces, comme les prêtres... car ceux qui ne recevront pas le vin seront terriblement jaloux et donc tentés de tout envoyer promener (ce qu’il faut espérer).

 

En plus, il sera fortement recommandé de ne plus dire la Messe en semaine, le monde moderne n’ayant pas de temps à perdre.

 

Une autre excellente méthode sera la Messe dite à domicile, en famille, juste avant ou après le repas pris en commun. A cet effet, les pères et mères de famille pourront recevoir le sacrement d’Ordre. Qui ne voit l’avantage de cette méthode qui supprime la nécessité de lieux du culte si onéreux.

 

Afin de désacraliser le culte, le prêtre sera invité à dire toute la Messe en langue vulgaire et surtout à réciter les paroles de la consécration comme un récit, ce qu’elles sont en réalité. Il ne devra surtout pas prononcer les mots : « Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang » comme s’il prenait réellement la place du Christ qui les prononça. Que chacun sente bien qu’il s’agit là d’un récit.

 

A plus forte raison, il ne sera jamais question de Sacrifice, c’est-à-dire de la Messe Sacrifice non sanglant, renouvelé de la Croix. Aucun protestant n’accepte cette formule.

 

Que la Messe soit uniquement un repas communautaire pour le plus grand bien de la fraternité humaine.

 

Du reste, quand l’Église universelle sera établie, la Messe n’aura plus de raison d’être que dans les familles, je veux dire chez les plus exaltés. Il faut compter avec cette catégorie de gens. Mais, justement, en restant chez eux, ils seront inoffensifs.

 

Les prières de l’Ordinaire de la Messe seront donc simplifiées au maximum et rapidement sera donnée l’autorisation de ne dire que trois prières, soit : l’offertoire, la consécration et la communion.

 

Quand nous aurons réussi à présenter différents textes simplifiés et humanisés, il sera bon de remettre en mémoire, pour l’édification des générations futures, ce que furent certaines prières de la Messe dite de saint Pie V qui contribuèrent à maintenir les foules dans un obscurantisme médiéval.

 

Ainsi l’offertoire est un modèle du genre ; il dit : « Recevez, ô Père Saint, Dieu éternel et Tout-Puissant, cette Hostie sans tache que je vous offre, moi, votre indigne serviteur, à vous qui êtes mon Dieu vivant et vrai, pour mes innombrables péchés, offenses et négligences ; pour tous les assistants et pour tous les chrétiens vivants et morts, afin qu’elle profite à mon salut et au leur pour la vie éternelle ».

 

Qui dit mieux ?

 

Je propose que tous les monastères travaillent à la fabrication de plusieurs offertoires, ainsi que des autres prières de la Messe. Et, puisqu’il s’agit d’offrir du pain, il me paraîtrait judicieux de dire tout simplement : « Nous apportons ici ce pain, fabriqué de main d’homme et qui doit servir à la nourriture des hommes ».

 

De toute façon, les mots qui tendent à présenter cette cérémonie comme sacrée doivent être supprimés. Je ne donnerai qu’un exemple : Dans l’ancienne Messe, on a toujours dit : « Jésus prit du pain dans Ses mains saintes et vénérables »... Le mot « saintes » devant disparaître de notre vocabulaire, on ne parlera pas des mains  saintes et vénérables, on dira : « prit du pain, le bénit », etc. Cela est un bon exemple de l’esprit dans lequel ce travail doit se poursuivre. Pour ma part, je n’ai pas le temps pour le moment, mais je donnerai aussi une ou plusieurs messes de mon cru. Cependant, c’est surtout un travail de moine.

 

Bien entendu, quand la Messe ne comportera plus que trois prières obligatoires, il sera toujours permis d’y ajouter : psaumes, cantiques, lectures et sermons... cela au goût de chacun.

 

Comme cette Messe ne gardera plus que sa fonction de repas, il serait très important que la table fût assez grande pour accueillir douze personnes. J’ai toujours trouvé ridicule ces gens qui, pour manger, sont obligés de se déranger et de se bousculer (car il ne faut pas nier qu’à la table de communion, c’est la bousculade). C’est de leur faute, pourquoi appellent-ils « table » une simple barrière ?... Donc, je verrais chaque église remplie de tables destinées à douze personnes. Certains pensent qu’à la Cène ils étaient treize, mais comme tout le monde a peur de ce chiffre, nous adopterons la formule qui veut que Judas fût parti avant la fraction du pain.

 

Cela marque la nécessité de fabriquer un beaucoup plus grand nombre de prêtres. C’est facile. Il suffira d’exiger une certaine bonne volonté, une certaine bonne conduite et pas d’études interminables ; ni de célibat, bien entendu. Cependant, ceux qui voudront bénéficier de la force qu’apporte la continence seront moines ou ermites et ceux qui voudront étudier seront théologiens. Il y aura donc plusieurs espèces de prêtres. Le plus courant sera l’homme marié qui dira la messe chez lui à chaque repas.

 

Comme la Messe ne sera plus que la Cène, elle ne sera plus un acte d’adoration, mais un acte de fraternisation. Elle ne remerciera plus pour des bienfaits illusoires, elle n’offrira plus un pardon qu’elle est bien incapable de donner, elle ne demandera rien au mystère de l’inconnu, mais tout à l’homme.

 

L’Église universelle seras donc enfin entièrement à la gloire de l’homme, elle exalterait sa grandeur, sa force, sa virilité. Elle encenserait ses droits et chanterait ses victoires.

 

(à suivre)

 

 

Du blog : Un tel machiavélisme qui en grande partie a échoué, montre l’importance de l’Église Catholique et pourquoi il faut l’abattre pour « tuer » la religion Chrétienne.

Le meilleur moyen en effet c’est de vouloir lui enlever son authenticité et de la fondre sous prétexte d’œcuménisme dans un cloaque réformiste(d’où a surgit une multitudes de courants religieux pour aboutir à la secte des témoins de Jéhova), sans aucune unité, où s’arguant chacun être chrétien dénigre naturellement, quasiment tous, l’Église Catholique, jugée trop dogmatique, conservatrice, veillotte et en perte de vitesse.

Les erreurs du second concile du Vatican (Vatican II, 1962-1965) sont indéniables, nous n’y reviendrons pas et constatons avec regret ses conséquences dommageables. Il a manifestement été imprégné d’idées manigancées en vue d’éradiquer l’Église Catholique en l’infestant d’éléments « réformistes » issues en droite ligne du machiavélique complot que nous décrit cette confession.

Fort heureusement pour nous Catho, malgré tant d’acharnement et nous en verrons encore davantage dans les temps qui s’en viennent, le rocher de Pierre tient bon et les forces de l’enfer quel que soit le déguisement qu’elles prendront ne prévaudront pas contre Elle.

Non en raison de nous, car notre faiblesse humaine est flagrante puisqu’à chaque fois c’est nous humains qui désobéissons à Dieu et voulons nous affadir afin de tendre vers une ouverture à l’autre. Mais le sel doit demeurer ce qu’il est pour continuer à donner du goût aux aliments, sinon il n’est plus et ne sert plus à rien.

De nos jours les tentatives pour nous polluer perdurent et ne sont que témoignages de notre force qui provient du Seigneur.

Nous sommes décriés, spoliés, mais recherchés par ceux même qui s’insurgent contre nous et non l’inverse.

Mais quoi que feront les uns et les autres, Dieu se tient à la tête de Son Église qui vivra son destin comme prévu dans les écritures.

Attaquée de tous bords, mises à mort(comme sa Tête : le Christ et Seigneur), elle le paraîtra, pour ressurgir dans sa Gloire à son 3ieme jour(unité de temps divin) au Cri de son Maître !

Que tous ceux qui voudraient nous évangéliser, nous endoctriner, nous « réformer », puisque souhaitant notre « bien », se posent la question à savoir s’ils ne devraient pas plus tendre à se « re-former » afin de devenir « amour » du Christ donc chrétiens.

Publié dans Témoignages

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