Les vertus théologales - Père Danjou - ARCHICONFRÉRIE DE LA SAINTE-AGONIE DE NOTRE-SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST – Partie N°2

Publié le par monSeigneur et monDieu

L’AMOUR

FACE À L’ÉPREUVE

 

Père Danjou, vous aimez rappeler la dévotion spéciale de notre archiconfrérie pour Jésus à Gethsémani. Comment nous met-elle sur le chemin de la troisième vertu théologale ?

 

Jésus, au jardin de Gethsémani, a affronté la pire des épreuves, celle de douter de sa mission. Il s’est interrogé sur la nécessité de subir la Passion qui l’attendait. C’est alors qu’il s’est confié à son Père en toute confiance et avec toute la force de son amour. « Père, que ta volonté soit faite, et non la mienne. » La plus grande expressionde l’amour est celle de faire la volonté de celui qu’on aime. La prière que Jésus adresse alors à son Père est la plus belle preuve de son amour. C’est à partir de cette expérience à la fois pénible et libératrice qu’il peut dire à ses disciples : « Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation. » La meilleure façon de rester fidèle à l’amour de Dieu au milieu des épreuves est certainement la prière.

 

Comment prier ?

 

Pour prier il faut d’abord le recueillement. Jésus choisit un lieu calme et discret, loin de la rumeur de la ville.

C'est le jardin des Oliviers. Il s'éloigne un peu de ses disciples pour ne pas être troublé par leur présence et pour éviter de se donner en spectacle comme il l'a conseillé lui-même. La prière est une rencontre privilégiée avec quelqu'un qui est Dieu. On ne peut se présenter devant lui n'importe comment. C'est pourquoi Jésus se met en disposition humble et recueillie.

La première prière est celle du corps car à travers lui s’expriment la profondeur et la vérité des sentiments. Il n'est pas possible de croire quelqu'un triste ou joyeux s'il présente un visage figé ou indifférent. Jésus se met à genoux et même, précisent les évangélistes Matthieu et Marc, il tombe à terre pour exprimer à la fois son angoisse, sa supplication et sa remise totale envers son Père. Cette attitude sera explicitée sur la croix lorsque le Christ, au moment d'expirer, dira : « Père, en tes mains, je remets mon esprit » (LC 23, 46).

Jésus peut exprimer cette confiance totale en son Père parce qu'auparavant il en a fait le thème de sa prière.

Nous ne sommes pas du premier coup adaptés à la volonté de Dieu. Il faut du temps pour se mettre à son niveau. Au jardin de Gethsémani, Jésus, malgré sa douleur, persévère dans sa prière, répétant, nous disent les évangélistes, les mêmes paroles.

 

Quel est le sens de cette précision ?

 

Dans les épreuves, nous sommes fragilisés. La meilleure façon de faire face est de rester fidèles à la prière quitte à redire la même chose. Il ne s’agit pas d’incantation comme si les paroles, par leur répétition, pouvaient avoir un pouvoir magique sur les événements, au point d'en changer le cours. La prière répétitive, si chère à certaines dévotions, à laquelle la liturgie elle-même se prête facilement montre que les sentiments les plus forts revêtent souvent les mêmes expressions. La joie comme la colère, la souffrance comme l’amour se limitent à un langage des plus simples. Les sentiments au paroxysme de leur manifestation, s'expriment avec peu de mots. La simplicité n’est pas alors signe de pauvreté mais de densité intérieure.

 

Ceci est particulièrement vrai quand nous sommes dans l'épreuve. La souffrance qui s'y exprime crée un trouble et ne permet pas de prendre une distance avec ce qui est vécu. N’oublions pas, cependant, que 1’épreuve n'a pas en elle-même un sens négatif. Elle peut être pour le chrétien l'occasion de faire la preuve de son amour pour Dieu en le poussant à une plus grande fidélité. Elle est aussi une tentation car elle est capable de nous faire fléchir dans nos convictions et notre attachement à Dieu. Voyez Adam et Eve !

 

Que voulez-vous dire ?

 

La tentation que nos premiers parents, Adam et Eve ont subie au paradis terrestre a provoqué leur défaillance.

Il n'était pas dans l'intention de Dieu de les mettre dans une situation provocatrice. Il a simplement formulé la règle que pour un être la liberté n'est pas de faire n'importe quoi, mais d'agir dans les limites de sa nature.

Tout n'est pas permis car l'homme n'est pas le tout de la création. L'importance que voulaient se donner Adam et Eve était naturelle, mais leur désir s'est perverti au moment où il a voulu s'imposer à la volonté divine.

Le démon leur a fait croire que Dieu ne les aimait pas autant qu'ils le pensaient, qu'il avait peur du pouvoir qu'ils pourraient obtenir en lui désobéissant. C'est ce qu'il leur dit : « Dieu sait que, le jour où vousmangerez du fruit défendu vos yeux s'ouvriront et vous serez comme des dieux qui connaissent le bien et le mal » (Genèse 3, 5).

 

Au fond, toute tentation est une épreuve d’amour ?

 

Tout à fait. Ce peut être ou non un moment privilégié pour prouver notre attachement à Dieu. Nous avons à choisir entre nos désirs égoïstes et Dieu qui nous appelle à partager son amitié, à répondre à son alliance,pour employer un terme biblique. Le Christ le dit bien : « Là où est ton trésor, là aussi sera ton coeur » (Mt 6,21).

Lui-même, affronté à l'épreuve de sa Passion, il ne manque pas de redire à Dieu son Père son attachement indéfectible : « Non pas ma volonté, mais ta volonté » lui dit-il. Sa prière se fait alors insistante. Nous comprenons pourquoi l'Eglise nous demande de prier pendant les tentations pour montrer à Dieu notre désir de lui rester fidèles.

Le pire des péchés est de douter de l'amour de Dieu à notre égard. Ce fut le drame de Judas qui, après sa trahison, a refusé de croire qu'il pouvait être pardonné. Comme le disait naïvement mais très justement une enfant du catéchisme: « Si j'avais été Judas, je me serais pendu au cou de Jésus ».

 

Sur quoi se base alors notre prière ?

 

La force de notre prière est basée sur le fait que nous avons la certitude que Dieu nous aime et qu’il nous aime en premier. C'est pourquoi nous pouvons lui dire, à la suite du Christ : « Notre Père ». Dans une famille, l'amour des parents pour leur enfant est toujours premier.

Dieu est notre Père parce qu'il nous aime avant même que nous puissions lui exprimer notre fidélité. Nous pouvons nous adresser à lui avec les mots du psalmiste: « Souviens-toi, Seigneur, de ta tendresse et de ton amour, car ils sont de toujours » (Ps 25, 6). C'est pourquoi notre prière doit s'exprimer avec simplicité et humilité à l'exemple du publicain de l'évangile qui disait: « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis » (Luc 8,13).

 

Quel sera l'effet de cette prière ?

 

La vérité de notre prière se révélera si, par elle, notre amour se purifie et s'agrandit, si notre amour pour les autres va de pair avec celui de Dieu. Il est frappant de voir comment le Christ, tout au long de sa Passion, exprime son amour pour les autres.

Souvent l’épreuve enferme la personne sur elle-même au point qu'elle perd la notion du temps, se refuse à tout projet et devient facilement agressive.

Le Christ, au contraire, tout au long de sa Passion, pense à ceux qui l'entourent. Au moment de son arrestation, il demande de ne pas inquiéter ses Apôtres (Jean 18,8). Au prétoire, il a un regard d'amitié pour Pierre qui vient de le trahir (Luc 22,61). Sur la route du Calvaire, il console les femmes qui se lamentent (Luc 23, 28).

Sur la croix, enfin, il confie sa mère à St Jean, rassure le bon larron et meurt en pardonnant à ses bourreaux.

 

Notre prière doit suivre l’exemple du Christ ?

 

Oui. Si vraiment, malgré les épreuves, elle est suscitée par un amour véritable, elle refusera de s'enfermer sur elle-même et englobera dans les mêmes sentiments Dieu et les autres. Car l'amour n'a pas de limite. Comme le dit saint Bernard « La mesure de l’amour est l’amour sans mesure ».

 

 

ARCHICONFRÉRIE DE LA SAINTE-AGONIE DE NOTRE-SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST

95 RUE DE SÈVRES - 75006 PARIS - TÉL : 01 45 49 85 00

http://www.sainte-agonie.fr

Publié dans Religion

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